de la revue 'La Grande Guerre' editeurs Opdebeeck Anvers, 1919
'Les Operations Autour de
Wavre Sainte-Catherine'

La Siège d'Anvers en 1914

le fort de Wavre Sainte-Catherine et environs

Le 28 septembre, nos 1re et 2e divisions se trouvent dans le troisième secteur, Waelhem-Lierre; la 3e et la 6e division occupent le quatrième secteur, Waelhem-Escaut; la 4 division est en position aux environs de Termonde-Schoonaarde, tandis que la 5e division forme la réserve générale.

Une belle journée d'automne se dégage des brumes du matin. La puissante tour de la cathédrale de Malines domine le joli paysage, comme aux jours heureux où les habiiants de la contrée d'entre la Nethe et la Dyle se livraient paisiblement à la culture des légumes, destinés au marché renommé de la ville de Saint-Rombaut, et où les briqueteries ressemblaient à de vastes ruches bourdonnantes.

Mais en arrière de Malines deux « saucisses » ennemies, deux ballons captifs surveillent les alentours comme des espions menaçants. Des taubes tournoient dans le ciel moutonné et toute cette agitation aérienne ne paraît pas de bon augure.

Dans les villages beaucoup de gens étaient restés, ignorant l'orage qui allait se déchaîner brusquement.

L'ennemi s'était établi dans les communes du côté opposé, jusqu'au-delà de Lierre, et il y avait déployé une grande activité.

Le sous-lieutenant Henroz, commandant de la 1re compagnie, 1er bataillon du 2e régiment de carabiniers, dont nous suivons partiellement le récit, se trouvait avec ses hommes dans la tranchée de l'intervalle situé entre la redoute de Dorpveld et de Wavre- Sainte-Catherine.

Devant les troupes se trouve la route de Malines à Wavre-Sainte-Catherine; derrière eux la voie ferrée Malines-Duffel-Contich-Casernes-Anvers, qui est coupée par la grand'route Malines-Duffel, à laquelle un fortin est adossé. A leur gauche, au-delà de Borsbeeck, veille le fort de Koningshoyckt. Une autre route conduit de Wavre à Duffel. Telle est la contrée qui s'étend devant la Nethe.

Vers 11 heures du matin, le 28 septembre, les soldats entendent un sifflement, puis une formidable explosion. A 150 mètres en avant du fort de Wavre-Sainte-Catherine s'élève une colonne de fumée d'au moins 20 mètres de haut.

« C'est un 420 millimétrés qui vient d'éclater. Exactement onze minutes après, un second obus, avec le même fracas, tombe à 50 mètres des glacis du fort. Tout le monde est sur pied, tous les yeux fixent le fort avec angoisse; le troisième obus ne se fait pas attendre: onze minutes après, il vient s'écraser en plein sur le fort...

« Pauvre Catherine! » disent les hommes. Malgré ses blessures, Catherine continue à cracher sa mitraille. Le feu des 420 se succède à intervalles de onze à douze minutes, durant toute la matinée; dans l'après-midi, il devient plus intense, les obus arrivent alors par salves de deux. Beaucoup manquent leur but, heureusement pour le fort. Cependant sa résistance est sérieusement compromise. Les bêtonnements, les cuirassements n'ont du reste été calculés qu'en vue du bombardement par des pièces de 21 centimètres au maximum. Ainsi voit-on souvent sortir, des souterrains de l'ouvrage, cinq ou six artilleurs, qui, rapidement, entre deux rafales, grimpent sur le fort et en toute hâte comblent, au moyen de sacs de terre, les excavations produites par les projectiles, puis filent à toutes jambes à l'approche des bolides. Certains même, bravant ces mastodontes de métal, continuent le travail; ces vaillants donnent aux soldats de la tranchée un bel exemple d'héroïsme; nous les regardons émerveillés, nous sentons notre courage grandir. Le bombardement cesse à 16 heures et demie exactement. La masse de béton du fort est fissurée, les couloirs bouchés par l'odeur écœurante des gaz de trotyl. Aucune victime de part ou d'autre. Le fort de Wavre-Sainte-Catherine a reçu le baptême du feu.

La nuit est calme, mais a la pointe du jour le bombardement recommence; bientôt, les grosses marmites tombent dru sur le fort. Parfois une de ces masses, mal dirigée, éclate dans l'intervalle. C'est un véritable tremblement de terre, le sol oscille, on croirait que la terre va s'entr'ouvrir et nous engloutir.

Bientôt le feu redouble d'intensité. A certains moments, le fort est canonné à la vitesse de 20 à 25 coups par minute avec obus de tous calibres. Le fracas est assourdissant, on s'entend à peine parler.

Chacun craint pour le fort et chaque fois qu'un obus est « but », les hommes murmurent: « Pauvre Catherine ».

Vers 10 heures, le tir à shrapnells contre les intervalles commence.

Ordre m'est donné par le commandant Havenith d'occuper avec une section la tranchée de combat; le restant de ma troupe s'établit dans la tranchée-abri, située à 50 mètres derrière.

Pendant ce changement, une volée de shrapnells s'abat sur le boyau de communication: quatre blessés très légèrement, dont le sergent Claudot, volontaire de guerre, qu'il faut évacuer. Ensuite, c'est au tour du village de Wavre-Sainte-Catherine d'« encaisser ».

Plusieurs salves y font assez bien de victimes, dont plusieurs civils. C'est la panique; les gens affolés, terrifiés, se sauvent, emportant quelques objets hâtivement rassemblés; les femmes en pleurs entraînent leurs bambins qui, ne sachant quoi, poussent des cris déchirants. A la nuit tombante, plusieurs maisons sont en flammes. Nous assistons impuissants à ce lamentable tableau, furieux de ne pouvoir venger ces malheureux.

De tous côtés, le canon gronde, l'air saturé de fumée est acre, l'odeur de la poudre nous prend à la gorge.

Enfin, peu a peu, tout rentre dans te calme, les sentinelles gagnent leur poste, au-delà du réseau des fils de fer barbelés. Jusqu'ici la cuisine s'est faite dans la tranchée, à côté d'un abri pour mitrailleuse; pendant le bombardement, un obué malencontreux plonge dans la douche, où cuit la soupe, projetant de toutes parts potage et viande; toutes les communications avec l'arrière étant coupées, le ravitaillement est impossible. Je recommande aux soldats de ménager les vivres qu'ils ont encore et de conserver à tout prix leur ration de réserve.

Les hommes, toujours calmes, oubliant déjà le danger qu'ils ont couru pendant la journée, ne protestent point; ils se rendent bravement à leur poste d'observation, pendant que leurs camarades vont prendre un peu de repos. La nuit se passe sans incident.

Le mercredi 30 septembre, la compagnie occupe toujours la même position. A peine le soleil est-il levé, que le bombardement des forts, de l'intervalle et de la redoute reprend de plus belle. Je reçois un renfort, une compagnie du 6e de ligne qui vient occuper la tranchée-abri.

Plus de 300 hommes grouillent dans ce trou. Je prévois un 42 sur cette tranchée! Quel carnage! Je tremble pour mes hommes en songeant au danger qu'ils courent. Mais eux n'y pensent pas; heureux du renfort inattendu, ils ne songent plus qu'à la victoire.

Les obus de tous calibres pleuvent de toutes parts, les obus-mines éclatent avec un fracas épouvantable.

Les coups se précisent et atteignent notre parapet. La tranchée oscille, va-t-elle s'écrouler? Les éclats d'obus tombent à nos pieds. Tout à coup, un obus tape sur la tranchée. La fumée dissipée, on s'aperçoit avec consternation que plusieurs hommes soîit ensevelis soiis les décombres! Un les entend crier. Au premier moment, personne ne bouge, nous sommes cloués au sol par la stupeur et l'effroi. Enfin, plusieurs volent au secours ue leurs camarades, je m'approche et vois avec horreur le pauvre Vander Stappen, complètement décapité. La tête, intacte, gît à ses pieds; trois autres, dont le sergent Dooms, sont grièvement blessés. Les obus arrivent par rafales, c'est épouvantable!

Les hommes atterrés se sont couchés, leur couverture sur la tête pour se protéger des éclats et pour ne rien voir.

A côté de moi, un soldat sort d'un calepin le portrait de sa femme et de ses enfants, ils sont trois groupés autour ue leur mère. Pendant cet infernal bombardement, ce pauvre homme, voyant la mort si proche, aime à revoir les siens; les larmes aux yeux, il secoue tristement la tête. Je m'assieds à ses côtés et, après quelques bonnes paroles, je parviens à lui faire reprendre courage.

Soudain il se lève, et tendant son poing vers l'ennemi, leur crie: « Arrivez donc, sales. Boches, nous allons voir si vous êtes aussi forts a la baïonnette qu'avec vos 42...

A peine a-t-il lancé les derniers mots de son apostrophe qu'une explosion plus formidable que les autres nous fait sursauter.

La poudrière du fort vient de sauter.

« Pauvre Catherine! »

Les soldats qui se trouvaient dans la tranchée ne pouvaient pas savoir à ce moment quels ravages épouvantables les mortiers avaient causés dans le fort.

La garnison y avait passé déjà deux journées terribles, jamais elle ne s'était imaginé un pareil bombardement. Le fort était secoué comme un frêle esquif au milieu de la tempête. Les murailles tremblaient et le sol se déplaçait. Puis des blocs de béton venaient s'abattre avec fracas. Des exhalaisons de gaz et de poudre se répandirent à travers les galeries. Les coupoles cédèrent, la moitié des canons fut mis hors d'usage, puis le magasin des poudres sauta avec un bruit formidable. Les flammes s'élevèrent, des pierres, du béton, des pièces u'acier furent projetées en l'air.

Des hommes avaient subitement disparu, entraînés dans ce brasier infernal; d'autres agonisaient, atteints d'horribles brûlures.

Et tout autour du fort l'ouragan de fer et de feu hurle toujours.

« Notre artillerie placée dans les intervalles, bien que soumise, elle aussi, à un bombardement violent, riposte avec vaillance, écrit le sous-lieutenant Henroz. Nos nom- mes en sont encouragés; ils se sentent soutenus.

Il est exactement 11 h. 45. Une estafette tout essoufflée: me tenu d'une main tremblante un pli fermé; c'est un ordre du commandant de la position fortifiée d'Anvers.

« Malgré le bombardement, et si terrible qu il soit, il faut résister à outrance, jusqu'à la mort! »

On résistera.

Je congédie l'estafette, un garçon de dix-huit ans, qui, sans se soucier des obus et des shrapnells. s'encourt vers son poste.

Les Allemands bombardent toujours avec acharnement la redoute de Dorpveld. Un 42 s'abat sur une maison située près uu fort. Il n'en reste que des décombres; ues briques retombent jusque dans notre tranchée. Enfin les heures passent, ia journée s'écoule tout doucement. Dans la soirée, la canonnade diminue d'intensité, les soldats en profitent aussitôt pour se promener et se dégourdir les membres.

Ils sont gais, contents de se revoir, heureux d'avoir échappé a la mort; et c'est toujours pleins d'espoir qu'ils attendent l'arrivée des Boches.

Résultats de la journée: un tué, cinq blessés. Les petits postes placés, chacun veille, personne ne veut se reposer, un croit a une attaque de nuit et tout le monde désire être là, pour donner le premier coup de feu, pour recevoir dignement l'ennemi.

Contre toute attente, la nuit se passe sans Incident, a part quelques patrouilles aperçues aux environs du village.

On arrive ainsi au jeudi 1er octobre.

Le bombardement, tant dans les intervalles que sur les positions arrière, recommence plus effroyable encore que les jours précédents; les Boches nous inondent de projectiles de tous calibres. Tout le monde reste inébranlable sous les averses de mitraille. Les batteries ripostent toujours. Seuls les forts se taisent, ils sont complètement détruits. Le bombardement se poursuit avec la dernière violence, comme si l'ennemi voulait nous écraser par les seuls effets de son artillerie lourde, contre laquelle il nous sait impuissants. Le vacarme est indescriptible.

En moins de vingt minutes je compte trois tués et une dizaine de blessés. Ma tranchée menace ruine; à tout prix, il faut la réparer; sur ma demande, quelques volontaires se présentent et malgré le bombardement travaillent avec ardeur. Les pertes sont grandes, mais nul ne songe à lâcher pied. L'ordre est venu de résister à outrance, de tenir malgré tout, nous obéirons, nous sommes résolus à mourir sur place. Les obus pleuvent toujours sans discontinuer.

A Wavre-Sainte-Catherine village, les ravages sont terribles, la localité entière tremble dans un bruit continu de tonnerre. C'est dans cet enfer pourtant que doivent demeurer les soldats chargés de la défense.

Le sous-lieutenant Blanokaert et ses mitrailleurs tiennent toujours près, de l'église; ils s'abritent comme ils peuvent ei leur impassibilité dans ce bombardement infernal n'est pas un des spectacles les moins impressionnants.

L'artillerie ennemie, toujours avec la même rage sacrilège, vise l'église, qui reste debout; le clocher est à peine touché; des maisons s'écroulent. Ue temps en temps une explosion plus puissante se fait entendre, quelqu'un déclare alors simplement: « Encore un 42 ». Il est visible que l'ennemi tente, par l'intensité de son bombardement, de rendre nos positions intenables, espérant nous démoraliser.

Dans notre pauvre tranchée qui oscille, qui tangue à donner le mal de mer, le spectacle est effrayant. Chaque fois qu un obus de gros calibre l'atteint, des positions entières s'éboulent, ensevelissant morts, blessés, vivants. Deux, Crois, quatre grosses marmites s'y abattent par minute.

Le capitaine du 6e de ligne tombe à mes côtés, l'épaule fracassée. Dans les tranchées, les hommes tiennen! bon, malgré l'horrible crispation des nerfs, la soif, la spectacle de leurs camarades déchiquetés, le gémissement plaintif des blessés.

Le sergent-major Démarche est blessé également.

Nos batteries tirent à toute volée. Pourtant elles ont fort à souffrir, car elles sont repérées exactement par les maudits ballons captifs. Des shrapnells brisants, des obus- mines éclatent jusque sur nos pièces; elles sont démolies les unes après les autres et les braves artilleurs gisent à leurs pieds. Horrible! la situation devient de plus en plus critique. En l'absence du capitaine du 6e de ligne qui est évacué, je prends le commandement de la tranchée. Il est 14 heures et demie précises.

Tout à coup, on aperçoit, à 200 mètres en avant du fort, deux hommes, dans le réseau de fils de fer. Pas de doute, ce sont des Boches, Que viennent-ils faire? Leurs obus ne tombent cependant pas loin d'eux. Soudain, trois salves partent des tranchées du capitaine-commandant A. E. M. Havenith; un Boche tombe, se relève et tombe une seconde lois, l'autre s'enfuit. Un quart d'heure après, il revient accompagné de deux camarades portant un brancard et agitant un drapeau de la Croix Rouge. Pas un coup de feu n'est tiré, le blessé est transporté vers les lignes allemandes.

Le bombardement continue pour diminuer d'intensité vers la tombée de la nuit.

Le commandant du fort, qui avait évacué son ouvrage, profite de cette accalmie pour le réoccuper, mais celui-ci est à peu près anéanti. Le lourd cuirassement d'une coupole de 15 centimètres a completement disparu, et l'incendie sévit dans les décombres.

Je fais immédiatement ensevelir les morts et emporter les blessés.

Vers 17 heures, je reçois l'ordre du commandant de l'intervalle d'occuper la tranchée de combat avec les deux compagnies. On prévoit une attaque pour cette nuit.

Tout à coup les sonnettes accrochées aux fils de fer tintent; pas de doute, ce sont eux. Au commandement de: « Feu à volonté », les hommes ouvrent le tir nourri sur les réseaux. C'est un feu d'enfer. Les coups coupent les fils et font voler des milliers d'étincelles. Hors, la redoute que tout le monde croit morte s'allume comme un brasier et envoie sur l'assaillant des rafales de mitraille. Les hommes crient déjà victoire, heureux de faire le coup de feu, mais furieux de ne pas apercevoir de Boches.

Il fait un noir d'encre. Impossible de voir à deux mètres devant soi.

Les Allemands, surpris dans leur attaque, ripostent ferme, mais leurs balles passent au-dessus de nous.

Trois quarts d'heure après, tout redevient calme.

De temps en temps, quelques balles ennemies semblent venir s'écraser derrière nous, contre un mur qui n'existe pas. Tout le monde à la même pensée: des balles explosives.

Plusieurs patrouilles sont envoyées fouiller les alentours. Je fais reposer les hommes par moitié.

Manquant presque totalement de munitions, j'envoie la sergent-major Crumphout prévenir le capitaine-commandant Havenith qu'il me faut des cartouches à tout prix. J'ai su après que le sergent-major n'était jamais arrivé.

L'attaque ennemie avait donc échoué grâce au courage et à la vigilance de nos troupes.

Derrière les lignes la tour de l'église de Duffel brûle ainsi qu'une torche géante. Le génie belge avait jugé sa disparition nécessaire.

Sur d'autres points du front l'action n'est pas moins violente. A Duffel, on voit des soldats s'avancer avec une civière. Au bord du drap mortuaire une main raidie apparaît.

C'est le commandant Nasy. Une balle l'a frappé en plein front.

Nasy avait été grièvement blessé dès le début de la campagne et transporté dans un hôpital. Encore imparfaitement guéri, il voulut retourner au front. Il avait repris sa place dans la tranchée la veille au soir. Quelques heures plus tard, il était tué. Ses soldats durent attendre une accalmie dans le bombardement avant de pouvoir ramener en arrière le corps du vaillant officier.

A 1.200 mètres environ du fort de Duffel, la 8e batterie d'artillerie de forteresse a pris position. Elle essuie une canonnade intense et plus de 200 obus et shrapnells s'abattent sur elle dans un rayon de 50 mètres.

Plusieurs artilleurs sont blessés.

Au commencement de la journée du 2 octobre, la grosse artillerie de l'ennemi reprend son tir d'écrasement. Elle vise les positions à l'arrière de nos troupes. D'au-delà de Waelhem elle attaque la 8e batterie installée près de Duffel. La gare est battue par les pièces allemandes de 9 h. à 11 h. 30 du matin; 250 projectiles tombent dans un rayon de 40 mètres.

Ce tir allongé prouve que les Allemands préparent une attaque.

Bientôt on entend retentir les cris: « Hoch! Hoch! »

Le solide édifice n'a pas disparu complètement et ce squelette imposant et tragique s'élève toujours au-dessus des plaines basses de la Nèthe.

Le commandant Havenith se retire en bon ordre, la compagnie d'Henroz doit suivre le mouvement, tandis que le caporal Deron et une dizaine d'hommes couvrent la retraite.

Les mitrailleuses allemandes fauchent une vingtaine d'homffies de la compagnie d'Henroz. Plusieurs blessés ne peuvent être transportés et restent aux mains de l'ennemi.

Les Allemands s'infiltrent de tous côtés et à 10 h. 35 les troupes belges se replient à l'ouest du fort jusqu'à la gare de Duffel.

A 12 h. 55 l'infanterie traverse le pont de la Nèthe. L'artillerie de la 1re division suit à 15 h. 50. L'ennemi est à une distance de 1.500 mètres. Un train vient recueillir les blessés. Un soldat de Gosselies atteint d'une balle dans la tête, meurt après avoir été déposé dans le train et on le décharge. Trois obus coupent les fils téléphoniques et télégraphiques et explosent contre le mur de la gare.

A 8 heures du soir, on fait sauter le pont du chemin de fer.

Le lieutenant Gernaert et le 3e bataillon du génie est chargé de cette mission.

Deux fourneaux de mine avaient été détruits par l'explosion; on place le troisième dans le remblai de la voie ferrée.

On donne le signal.

Le pont ne saute pas!

Et l'ennemi approche. Il faut se hâter.

Les hommes s'élancent sur le pont, où ils sont accueillis par une pluie de shrapnells.

Le pontonnier Muyshondt découvre la cause du contretemps. Un partie du ballast s'est déplacée par suite du passage de l'infanterie.

Un nouveau signal retentit et cette fois les 600 kilos de tonite accomplissent leur œuvre ae destruction. Les pièces de maçonnerie» des blocs de granit, les ferrailles tordues forment un invraisemblable chaos auquel la Nèthe vient se heurter avec un bruit de cataracte.

La 1/1 du 2e carabiniers, dont nous venons de décrire les aventures héroïques, est arrivée à Duffel. Le sous-lieutenant Henroz fait un appel général; 75 soldats manquent: tués, blessés ou disparus

II reste deux gradés: Henroz et le-premier sergent Coppens. Les survivants se replient sur Linth, déplorant la perte de leurs camarades qui dorment leur dernier sommeil sur le sol natal qu'ils ont si vaillamment défendu.

Le régiment tout entier est maintenant dans ce village, y compris les détachements qui ont lutté près de Koningshoyckt.

Un sergent, nommé Delobbel, reçoit les félicitations de son chef de corps pour sa belle conduite et sa bravoure. Il avait, au péril de sa vie, sauvé son chef, le commandant Van der Minnen, qui avait été enseveli dans sa tranchée par le bombardement.

Ce sous-officier avait encore un autre exploit à son actif.

La compagnie se trouvait immédiatement entre le fort de Koningshoyckt et la redoute de Borsbeeck; les artilleurs d'une batterie de 75 qui appuyaient la tranchée a gauche, avaient abandonné leurs pièces. Et cependant, des pièces étaient de la plus grande utilité pour contre-battre les pièces allemandes et l'infanterie boche installées à 500 mètres de la position.

Sans hésitation et empesté par son patriotisme, Delobbel, qui savait manier le canon, se présenta pour remettre la batterie en action. Avec trois hommes, dont un artilleur blessé, il gagne la batterie dont toutes les défenses sont bouleversées, et qui n'a plus d'épaulement. Sous les feux directs de l'infanterie et des grosses pièces, le sergent Delobbel voulut commencer le tir à 600 mètres avec boîte à balles, mais malheureusement les artilleurs avant de s'enfuir avaient déboulonné les culasses et les tire-feu. Avec les bretelles de leur besace, nos gaillards ouvrirent un feu d'enfer. Malheureusement, exposés au tir de l'infanterie, deux des servants improvisés sont mis hors de combat; un éclat de shrapnell tue le dernier. Deux pièces sont hors d'usage, qu'importe, notre sous-officier continue seul et les obus tombent dru sur les Boches. Mais bientôt, exténué, canardé à outrance et sa dernière pièce venant d'être démolie, il est obligé de se terrer et ce n'est que dans la soirée qu'il peut regagner la tranchée. Inutile de dire s'il y fut bien reçu!

Tels sont les principaux événements qui se déroulèrent à Wavre-Sainte-Catherine pendant le siège. Nous allons voir maintenant ce qui se passa à Duffel.

 

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