de la revue ‘ La Grande Guerre du XXième Siècle’ no 6 de juillet 1915
'Ambulances et Hopitaux Militaires'

La Tournée d'Ambulance

 

 

20 décembre 1914

Lettre d'un aumônier militaire communiquée par M. H. Lauriol, de Carmaux (Tarn):

..... On a dîné, l'ombre est venue. C'est l'heure de la relève des blessés.

Cette opération ne peut se faire que la nuit, car, le jour, le convoi servirait de cible à l'artillerie ennemie.

Ce soir, nous avons à faire une longue tournée; nous devons visiter les postes de Rozelieures, de Remenoville, de Gerbéviller. Nous prenons toutes nos voitures. Sans lanternes, le convoi s'avance invisible sur les routes défoncées. Le ciel est clair, mais l'air est chargé de miasmes et de puanteurs. Du haut des crêtes, l'œil aperçoit à l'horizon des nappes rougeàtres qui émergent des cimes sombres des forêts: ce sont des villages qui flambent. Je les compte: il y en a cinq! Çà et là, des vibrations fulgurantes, des rais de lumière, des sillages de feu: c'est la révélation de la présence sinistre des armées, dans le silence impressionnant que coupent seulement le grondement du canon et le croassement des corbeaux.

Voici Rozelieures. Là, dort notre pauvre lieutenant Hugot-Derville! Le village est abandonné, désert, ruiné; quelques maisons brûlent encore d'un feu comme assoupi. On traverse; la route monotone s'allonge.....

Remenoville, où j'étais passé déjà, est méconnaissable: les ravages sont énormes.

Le convoi s'arrête. Nous pensions trouver six blessés; il y en a trente. Nous en prenons dix, les plus atteints. Les pauvres autres attendront jusqu'à demain les voitures de réquisition, ou bien ils se traîneront à pied.

Entre temps, je puis assister quelques mourants.

Nous voilà repartis. La route de Gerbéviller, bordée d'arbres, toute droite, longe les lignes prussiennes. En plein jour, nous serions criblés.

Il est près de minuit quand nous atteignons l'entrée de la petite rille, théâtre, depuis dix jours, de luttes sanglantes. Et, justement, voici qu'au moment où nous atteignons le passage à niveau, une jalterie française, cachée derrière le talus, est en train de se quereller à voix très haute avec l'artillerie allemande, postée au delà de la Mortagne. Les obus tombent derrière nous, à côté de nous, devant nous. Nos équipages s'arrêtent. Que faire? II est aussi dangereux de reculer que d'avancer.

Je descends de voiture; le jeune aide-major commandant le convoi me rejoint. Après une courte délibération — le temps de constater que le tir est tâtonnant et nous vise mal, — je vais me mettre, à pied, en tête, et mon jeune ami me suit: « En avant! »

Les attelages s'ébranlent; nous passons..... Mais trois hommes de l'infanterie sont frappés dans la rue, à côté de nous!

Le petit hôpital de Gerbéviller, asile perdu dans cet enfer, nous a entendus arriver. Les portes s'ouvrent. Seul debout au milieu de la ville effondrée, grâce aux blessés allemands qu'il abrite, ce poste subsiste, contre toute vraisemblance, par l'héroïque obstination de trois bonnes Sœurs, citées, la veille même, à l'ordre du jour de l'armée. Le cœur des femmes les dispense d'avoir du bon sens et les rend capables des plus sublimes folies, surtout quand ces femmes portent une croix sur la poitrine.

Fait pour recevoir vingt malades, ce petit hôpital contient, cette nuit-là, cent vingt ou cent trente blessés. Sous le feu tonte la journée, il est devenu, ce soir, un lieu d'épouvante. Les infirmiers, énervés, affolés, parlent haut et gesticulent tous à la fois; les malades, entassés sur les lits, entre les lits, dans les corridors, remplissent tout de leurs appels, de leurs plaintes; l'acre odeur du sang, de la poudre, des drogues, vous prend à la gorge et vous suffoque. Seules, les Sœurs sont calmes et tout à leur affaire, ainsi qu'un jeune prêtre qui, infirmier militaire, a été autorisé à rester avec elles.

Nous procédons au triage des malades, car nous ne pouvons pas en emporter plus de trente. Le lugubre défilé des brancards s'organise, tandis que l'incessante mitraille crépite et tonne. Je donne les derniers sacrements aux plus atteints.....

Vers minuit et demi, tout est prêt. Nous laissons là quatre-vingts malheureux, qui devront patienter jusqu'au lendemain.

Lentement, nous repartons, tandis que les derniers obus tombent à droite et à gauche de la route. Bientôt, nous avons regagné la zone d'accalmie; la nuit seule nous enveloppe de son mystère.

Les heures passent. Le lourd cahotement des voitures arrache des cris aux blessés. Derrière moi, dans ma voiture, dont j'occupe le siège, quatre hommes étendus gémissent. L'un d'eux, dans le délire, appelle sa mère à plein gosier. L'autre agonise..... et j'entends son râle! Il meurt..... et je sens sa main se crisper sur mon manteau!

Le jeune médecin assis à côté de moi, pénétré, étreint, bouleversé comme moi de toute l'horreur de notre impuissance, me souffle.

— Si nous priions pour eux?

— Oh! oui, oui, lui dis-je.

Et, à haute voix, tous deux, les yeux, remplis de larmes, et implorant te ciel oui les étoiles brillent, nous récitons les prières des morts, tandis que le moribond achève de mourir.....

Il est 2 heures du matin. Nous voici de retour à l'ambulance. Les médecins, se frottant les yeux, nous reçoivent. On décharge le mort, puis les blessés, un à un. Un à un, on les porte sur un chevalet pour refaire leurs pansements. J'assiste au « déballage » de plaies; je m'efforce de distraire le patient en lui parlant de son pays, ou de la bataille, ou du bon Dieu. En même temps, je maintiens un bras ou une jambe. Puis, lorsqu'ils sont couchés sur la paille, épuisés de fatigue et de souffrance, je les visite l'un après l'autre, j'aide à les installer mieux, je veille à les faire boire, j'achève l'œuvre de salut commencée pour ceux qui ne passeront pas la nuit.

L'ambulance est pleine. L'acre odeur nous étouffe; les médecins tombent de fatigue: Aux fenêtres, le petit jour se montre. Il est 4 h.1/2. Le sommeil tombe enfin sur tous ces corps pantelants.....

Je sors. Sur la place, un jeune soldat brancardier qui n'a pas dormi, lui non plus, m'accoste et me dit:

— Monsieur l'aumônier, voulez-vous dire votre messe? Je vous la servirai.

— J'y vais! lui dis-je.

Le temps de laver à la fontaine mes mains couvertes de sang, et j'entre à l'église.

En sortant, j'apprends- la grande victoire de nos armées. Je me sens consolé et reposé de tout!

[Echo de Paris.]

 

 

Un Tour à l'Hôpital Militaire

Mars 1915

Lettre inédite, provenant d'un hôpital du Midi:

Faisons un tour à l'ambulance, nous y trouverons nos braves soldats en train de recoudre des boutons à leur capote, de frotter, brosser, astiquer leur uniforme; c'est un grand départ qui se prépare. Les amputés, sous la direction d'un sergent amputé lui-même, marchent au pas avec leurs béquilles pour savoir s'ils pourront jamais reprendre du service, et l'on entend dans la cour: « Portez armes!..... En avant..... Marche!.... Repos..... » Ils rient, chantent et prennent courageusement leur sort d'unijambistes comme ils disent.

Mais il y a des constatations navrantes; ainsi l'un d'eux disait l'autre jour:

— J'ai cru avoir mes deux jambes, tout à l'heure; j'ai voulu marcher et je suis tombé. C'est tout de même pas drôle..... Enfin, quand j'aurai mon pilon (jambe de bois), je taperai sur les Boches.

Il y a aussi parmi eux de beaux exemples..... Un de nos blessés se plaignait de sa jambe, qui le faisait souffrir. Sa mère, témoin de sa plainte pourtant bien légitime, lui dit très doucement:

— Apprends, mon fils, à souffrir en silence; Notre-Seigneur n'a-t-il pas souffert encore davantage sur la croix?

Et ce pauvre petit malade de répondre docilement:

— J'essayerai, maman.

Il ne se plaint plus, et le dimanche, comme il ne peut encore se lever pour aller à la messe, il prend son paroissien pour s'y unir.

Après leur départ, nos blessés guéris prouvent combien leur gratitude est sincère et combien leurs sentiments de chrétiens et de patriotes sont profonds..... L'un d'eux, un Poitevin, nous écrivait cette phrase: « Maintenant que Dieu m'a redonné la santé, je repars courageusement au front dépenser les nouvelles forces acquises, et si, pour effacer tant de crimes, Dieu exige encore des victimes, je suis prêt..... C'est la justice de Dieu qui passe..,.. Et puisque c'est nous qui avons l'honneur d'être choisis comme sacrifiés, allons-y vaillamment. » Et c'est pourtant un père de famille!

[Communiqué à la Grande Guerre au xxe siècle.]

 

Mort sur la Table d'Opération
Extrait du Carnet d’une Infirmière de Noelle Roger

28 mars 1915

Ce petit soldat, avec sa pauvre figure de vingt ans, son courage, ses terribles blessures, avait tellement ému l'infirmière qui le soigna à l'ambulance de la gare, qu'elle a voulu le revoir.

Hier je l'ai rencontrée, sur la route qui longe le lac; elle venait à notre hôpital.

— Dans quelle salle est-il, demanda-t-elle, ce petit Georges Laurent, qui est arrivé hier au soir?

— Je vais vous conduire.

— J'ai pourtant vu bien des soldats, expliquait-elle, tandis que nous gravissions l'escalier. J'ai été bien souvent bouleversée d'admiration et de pitié..... Mais celui-ci, il est à part..... Je ne sais pourquoi..... Il a fallu que je le, revoie.…

Et elle ajouta tout bas:

— Savez-vous ce que votre chirurgien a dit? Croyez-vous qu'on le sauvera?

J'hésitais à répondre. Car le pauvre enfant avait un bien mauvais pronostic hier au soir. Enfin, je lui dis:

— La jambe et le bras droits sont bien malades..... Et il paraît épuisé..... Pourrait-il supporter une double amputation? On a prévenu sa mère, ce matin, par dépêche.

Et j'ajoutai:

— Cependant, vous savez, on en a vu ici revenir de si loin! Nous marchions en silence, regardant l'eau bleue où se reflétait la montagne. Nous sommes entrées. Et je la précédai au chevet du lit.

Un pâle petit visage tiré, de grands yeux douloureux, de beaux yeux couleur de noisette, qui devaient être singulièrement brillants et joyeux, autrefois. Un cerceau soulevait la couverture au-dessus de sa jambe blessée. Le drap recouvrait son épaule droite. Et sa main valide remuait continuellement sur sa poitrine.

— Comment allez-vous, mon petit? disait la voix affectueuse de la jeune fille. Me reconnaissez-vous? C'est moi qui vous ai donné à boire hier quand on vous a descendu de wagon. Vous étiez si gentil que j'ai voulu venir vous dire bonjour aujourd'hui.

Il la regarda. Il essaya de sourire. Il répéta:

— Si gentil.....

Et il ajouta:

— Aujourd'hui..... je ne suis pas gentil.....

Alors, se tournant un peu vers moi comme pour me prendre à témoin, il dit d'une voix qui s'excusait:

— N'est-ce pas, Madame..... Quand on a trop mal, on ne peut pas être gentil?.....

Nous sommes demeurées sans paroles.

Il avait clos ses yeux comme pour s'enfermer en ce tête-à-tête abominable avec sa souffrance. Et nous étions là, debout, de chaque côté de son lit, navrées de notre impuissance à le soulager. Nous ne pouvions rien. Personne au monde ne pouvait rien pour lui. Nous lui passions nos mains sur ses cheveux. Nous essuyions la sueur sur ses tempes. Son mal déjà le détachait de toutes les choses, l'emportait loin de nous dans une solitude où personne n'avait accès. Et là se poursuivait le combat sans répit qui absorbait ses forces et ses pensées.

Parfois il ouvrait les yeux et nous regardait. Et son regard semblait dire:

— Je suis bien..... .Vous êtes là..... Je sais bien que vous faites ce que vous pouvez..... Mais moi, je suis si loin..... si loin..... Vous ne pouvez plus m'atteindre..... Il faut que je me batte tout seul, et personne ne peut m'aider.

La jeune infirmière répondit à cette parole muette:

— Ce sont les plus mauvais moments, mon petit. Demain, vous serez déjà mieux..... Plus tard, je reviendrai vous voir. Je ne vous oublierai pas.

Il eut de nouveau pour elle son sourire pâle et résigné. Il la regardait. Et nous devinions toutes les deux la signification de ce regard.

— Vous viendrez..... Vous êtes bonne..... Mais vous ne me reverrez pas.....

— A bientôt, mon petit, dit-elle, en lui caressant la main. Il referma les yeux.

Elle est partie, navrée.

Ce matin, sur l'ordre du docteur, son infirmière l'avertit tout doucement qu'on serait obligé de lui couper le bras. Et elle savait déjà qu'il faudrait aussi amputer sa jambe, dans peu de jours, s'il supportait.

Il ne protesta pas. Mais il se mit à pleurer. Sa souffrance lui laissant un peu de répit, il se rattachait déjà à la vie. Et il s'abandonnait à un chagrin violent qui s'exprimait d'une manière enfantine. Toute la journée, il rejeta le drap, afin de contempler, dans la gouttière, sa main condamnée. Il répétait:

—- Ma pauvre main..... Je ne te verrai plus..... Ma main chérie.....

De sa paume ouverte, il la caressait doucement. Il caressait chacun des doigts l'un après l'autre.

Son infirmière ne le quittait pas.

Patiemment elle ramenait le drap, essayait de raisonner ce désespoir. Mais lui demeurait sourd à toutes les consolations.

Au moment où l'on allumait les lampes, les brancardiers vinrent le chercher.

La nuit avance. Et je suis là, assise devant ma table, sans forçe pour me déshabiller. Je frissonne. La scène de ce soir me hante et me glace.

On a apporté à la salle d'opération le petit Georges Laurent. Je revois toujours son mince visage blanc. Et lorsqu'il fut étendu sur la table, tandis que Ducret soutenait la gouttière et que l'abbé Pallinges, en sarrau d'infirmier, déroulait la bande, je revois le regard dont il couvait sa main. Ce regard douloureux me faisait tellement mal que je fus soulagée lorsqu'on eut posé le masque sur son visage. Je pensais:

« Il perd conscience..... Il ne sait plus..... Il ne souffre plus..... »

L'humérus venait d'être scié..... lorsque, tout d'un coup, je vis le chirurgien et son aide se pencher brusquement sur le corps et rejeter le masque. La petite figure blanche, immobile, ne respirait plus.

En hâte, les deux docteurs et l'interne pratiquèrent la respiration artificielle, les tractions de la langue. De brèves paroles s'échangeaient à demi-voix, tous s'affairaient autour du corps grêle, aux formes presque enfantines.

Mais tout fut inutile. Le choc opératoire avait emporté le petit soldat. Les minutes passaient, très longues. Je vis les docteurs se relever avec un geste d'impuissance. Une douleur muette contractait le noble visage du chirurgien-chef.

Tout d'un coup, dans l'intolérable silence, une voix s'éleva. Je me retournai et j'aperçus l'abbé à genoux, dans sa blouse d'infirmier, et qui récitait les prières des agonisants.

— Sortez de ce monde, âme chrétienne, au nom de Dieu le Père tout-puissant qui vous a créée.

Il me semblait vivre un rêve atroce, et je regardais autour de moi avec stupeur: sur la table, ce corps nu, maculé de sang, ce bras coupé, qu'on n'avait pas eu le temps d'emporter, et qui gisait dans un coin, du sang sur le sol, sur nos sarraus, et ce prêtre en blouse blanche éclaboussée de rouge, agenouillé.

— Au nom de Jésus, Fils du Dieu vivant..... Au nom du Saint-Esprit, qui s'est communiqué à vous..... Au nom des Anges et des Archanges..... et de tous les Saints et Saintes de Dieu. Que vous soyez aujourd'hui dans la paix.....

Je m'adossais au mur. Mes jambes refusaient tout service. Devant moi s'évoquait cette vie de vingt ans..... Un garçon joyeux qui partit crânement avec des fleurs sur son uniforme..... Sa mère l'avait suivi des yeux, sa mère qui arrivera demain..... Qui n'a que lui, peut-être.

Et cette mort de ce petit que j'aimais, parce qu'il était si jeune et si souffrant, évoqua la mort de tous les autres..... Ce jeune corps, mutilé, dans ce sang, devenait le symbole tragique de l'horreur à laquelle nous assistons. Il me sembla que je ne pouvais plus supporter une telle somme de détresse humaine. Et les lèvres contractées, les mains tremblantes, je sentais une angoisse me submerger toute.

Ce fut alors que, dans cette salle ensanglantée, dans le bouleversement de mon cœur, la voix du prêtre fit entrer un apaisement qui s'imposait peu à peu, et fit taire nos pensées, cette voix qui rattachait l'atroce misère de cette heure à toutes les grandeurs divines. Ce fut comme une présence ineffable nous pénétrant peu à peu. L'invocation sublime apportait dans cette chambre la compassion de tout le ciel.

Lentement, à cette paix se mêlait comme une sorte d'étrange bonheur.

Le prêtre prononçait:

— Que Jésus vous montre un visage plein de douceur et de joie, et qu'il vous mette au nombre de ceux qui sont toujours à sa suite.....

La vie mystérieuse de l'Invisible s'affirmait en de lumineuses perspectives. La confuse espérance qui demeure même aux cœurs qui ont perdu leur foi devenait une magnifique certitude. Les solennelles paroles tombaient une à une. La prière s'achevait en un cri de triomphe. Et il me sembla voir resplendir devant nous les béatitudes éternelles:

— Saints amis de Dieu, accourez à son secours. Anges du Seigneur, venez au- devant de cette âme pour la recevoir et la présenter à Jésus-Christ.

Mais, cette nuit, les paroles évocatrices se sont tues. Je suis seule, et l'angoisse revient.

J'étouffe. J'ouvre la fenêtre et je respire de toute ma force la pure nuit d'automne. Le lac pâle réfléchissait la montagne. Le silence de cette nuit claire pénétra dans la chambre. J'essayai de me représenter la belle petite âme du héros de vingt ans, traversant les espaces étoiles et montant vers l'Invisible.

Alors je me rappelai les paroles que l'abbé prononça un jour sur la colline dominant la ville. Et je pensai qu'aucune goutte de ce sang répandu, que pas une de nos larmes n'étaient indifférentes...... Aucune de nos larmes ne tombe dans la solitude.

Vous toutes, les mères qui pleurez, ne sentez-vous pas autour de vous cette compassion infinie..... Elle monte à vous de toutes les villes et de toutes les campagnes, de tous les cœurs qui pensent avec douleur et reconnaissance à celles qui ont donné leur fils.....

Tous les jours qui commencent, et tous les jours qui s'achèvent vous apportent dans votre chambre cette compassion respectueuse et tendre, cette universelle compassion humaine; elle vous enveloppe silencieusement et peuple votre solitude.....

Et la prière de ce soir mè révèle qu'auprès de vous veille une compassion plus douce encore, et miséricordieuse, celle qui prépare à l'âme que vous aimez l'adorable accueil, et qui vous donne en secret la certitude merveilleuse du revoir.

Noelle Roger

[Journal de Genève.]

 

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